En manque d’eau, les nappes phréatiques françaises débutent l’année dans une situation «préoccupante»
«J’adore l’eau. Dans vingt, trente ans, y en aura plus», répétait l’acteur Jean-Claude Van Damme au cours d’une interview datée de 2010. Bouteille d’eau minérale à la main, se désaltérant au goulot, sa verve devenait virale. Les prédictions du kickboxer se réalisent plus vite qu’il ne l’avait imaginé. Car l’eau manque. Du moins pour les nappes phréatiques françaises.
Selon un rapport du Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM), les nappes phréatiques françaises se trouvaient fin décembre à des niveaux «préoccupants» sur une grande partie du pays. «Les niveaux des nappes du mois de décembre sont peu satisfaisants. En effet, les pluies infiltrées durant l’automne sont très insuffisantes pour compenser les déficits accumulés durant l’année 2022 et améliorer durablement l’état des nappes», écrit l’organisme public dans un bulletin de situation réalisé le 1er janvier.
«La situation est à suivre, les précipitations pourraient revenir sur l’Aude et les Pyrénées Orientales à partir du 17 janvier, développe le chercheur en agroclimatologie Serge Zaka sur Twitter, carte à l’appui. Elles ne seront pas suffisantes pour combler le déficit mais cela permettra de soulager la faune et la flore sur les premiers centimètres du sol».
Les pluies de l’automne, sur des sols très secs, ont en effet profité en premier lieu aux sols en surface et à la végétation avant de recharger les nappes en profondeur, précise le rapport. «En conséquence, plus des trois quarts des nappes restent sous les normales mensuelles avec de nombreux secteurs affichant des niveaux bas à très bas», relèvent les analystes, soulignant que «les niveaux sont nettement inférieurs à ceux de décembre de l’année dernière». Le BRGM constate ainsi des niveaux «préoccupants sur une grande partie du territoire», avec toutefois quelques exceptions locales comme la Bretagne ou Alsace.
Année la plus chaude jamais enregistrée
Selon Météo France, 2022 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France avec 14,5 degrés de température moyenne annuelle mais aussi l’une des plus sèches, accusant un déficit de pluviométrie de quelque 25 %. La sécheresse et la canicule estivale ont eu d’importantes répercussions sur l’agriculture ou la production d’électricité hydraulique et nucléaire.
«2022 est un exemple emblématique d’une année marquée par le changement climatique», indiquait il y a une semaine à Libération Christine Berne, climatologue à Météo France. L’année n’a pas seulement été bouillante. Elle a coché toutes les cases des événements extrêmes. Incendies monstrueux en Gironde (Landiras, La Teste-de-Buch, Saumos), canicules marines en Méditerranée, gel tardif début avril, tornade dans les Hauts-de-France, crues dans le Sud-Ouest, orage brutal et meurtrier en Corse, inondations en Guadeloupe, cyclones à la Réunion. En France, la fournaise a connu son apothéose cet été, avec trois vagues de chaleur (notamment en juin où les 40 °C ont pour la première fois été atteints ce mois-là). Selon Météo France, la chaleur de début mai à fin août a été rendue 500 fois plus probable par le changement climatique.
Dans son bulletin des grandes tendances climatiques sur trois mois pour la période janvier-mars 2023, Météo France n’avançait fin décembre «aucun scénario» précis en termes de précipitations pour la France. Or ce sont les pluies qui seront déterminantes. «Les tendances et l’évolution de l’état des nappes en période hivernale dépendent exclusivement des pluies infiltrées, et donc des cumuls pluviométriques, et de l’inertie de la nappe (temps de réponse à une pluie infiltrée)», souligne par ailleurs le BRGM.