Au-delà de l’affaire Senelec-Le Témoin…

Dans son édition de ce vendredi 8 septembre 2023, le quotidien ‘’Le Témoin’’ signale à ses lecteurs qu’il a fallu de peu pour que le journal soit absent des kiosques. « Si vous avez l’opportunité de le lire, eh bien rendez grâce à la toute puissante Senelec ainsi qu’à son directeur général, le dictateur au petit pied Pape Mademba Bitèye », souligne une note de l’éditeur. D’après le journal de Mamadou Oumar Ndiaye, la Senelec a coupé le courant des locaux, parce que Le Témoin a publié des articles sur le fait que le prix du woyofal ‘’a augmenté subrepticement’’.
 
 D’après le journal, c’est cet écho fait de la colère des consommateurs qui lui a valu ces représailles. Et pour ce faire, la société publique d’électricité s’est contentée de « couper les arrivées de l’électricité » dans les bureaux. 
 
Le Témoin précise qu’il est passé au mode Woyofal depuis qu’il a déménagé de ses locaux de Colobane, ce qui veut dire qu’il ne doit aucune arriérée à la Sénélec, puisque ce n’est pas possible avec le prépaiement. La Senelec a tout de même fini par rétablir le courant, selon le Témoin. De prime abord, cette question semble relever d’une affaire privée entre deux sociétés. Mais si l’on essaie d’aller plus loin, on se rend compte qu’il y a une question essentielle qui se pose : les rapports entre la presse et les sociétés nationales. Rappelons d’abord que pendant la décennie 2001-2011, la Senelec faisait partie des sociétés publiques les moins cotées au Sénégal. Elle faisait l’objet de vives critiques de la part de la presse qui relayait ainsi le sentiment des usagers. 
 
La Senelec a été même surnommée Société des ténèbres ou ‘’coupélec’’, tellement les coupures étaient récurrentes. Il faut admettre tout de même qu’il y a un grand bon en avant sur la fourniture d’électricité. La Sénélec d’aujourd’hui n’a rien à voir avec la Sénélec d’hier en matière de fourniture du courant électrique. Mais si la Senelec de Wade était criticable sous l’angle de la fourniture, la Sénélec de Macky l’est autant sous l’angle du prix. Il devait donc y avoir autant d’articles pour dénoncer la cherté du prix de l’électricité. En droit, on dit que l’aveu est la reine des preuves. Ecoutons donc la direction de la Senelec a ce sujet : « Je peux vous dire que ce sont les tarifs les plus chers de la sous-région ouest-africaine, actuellement. Nous en sommes conscients ». Ces mots sont ceux de la directrice commerciale, Tabara Ndoye Ba citée par Sika Finance. Mais bizarrement, il y a peu d’articles pour dénoncer cette cherté. 
 
La Senelec semble au contraire bénéficier d’une immunité en la matière. Il s’y ajoute que tout consommateur a bien constaté la hausse sur le woyofal. Peu importe ce qu’en dit la Senelec ! Lorsqu’avec 15 000 F, vous receviez 167 Kw et qu’aujourd’hui, avec ce même montant, vous êtes à 142 Kw, vous n’avez pas besoin d’être un expert en la matière pour constater une perte de 25 Kw. Et les témoignages sont lésion sur les réseaux sociaux. Certains ont écrit de longues contributions pour dire qu’ils veulent quitter le système woyofal qui n’est léger pour aucun consommateur.
 
 Si donc la Senelec se permet de sanctionner Le Témoin, c’est qu’elle est consciente de sa force vis-à-vis de la presse. Et si nous nous attardons sur la Senelec, c’est juste qu’elle est au devant de l’actualité. Mais aujourd’hui, le constat est presque le même avec la quasi-totalité des sociétés publiques. Toutes ou presque ont réussi à se payer les faveurs de la presse. Dans la production médiatique, il existe peu d’articles critiques sur la gestion des sociétés publiques.
 
Parce que tout simplement toutes ces sociétés sont devenues des ‘’partenaires’’ de la presse. On signe des conventions à tout va pour acheter le silence des médias. Combien de reporters se sont entendu dire : ‘’on ne peut pas publier ce papier, parce que c’est un partenaire’’. C’est ce silence coupable qui a donné à la Senelec et à d’autres sociétés le sentiment de toute-puissance au point de vouloir sanctionner un média pour un article critique.

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