Antivax, anti-migrants : qui est le prêtre Michel Viot, tête de gondole de l’ultra droite catholique ?

Lundi encore, le père Michel Viot partageait sa vision de la charité chrétienne entre deux remarques sur la guerre en Ukraine et l’utilisation généralisée de l’anglais chez Uber : «La dispersion des immigrés en province est une grave erreur ! Nos compatriotes de ces régions ne sont pas habitués comme les Parisiens à se laisser pourrir la vie. Ils se défendront eux-mêmes, surtout loin des villes. Regrettable, mais inévitable je le crains !» a-t-il écrit.

L’abbé multiplie les prises de position sur des sujets d’actualité, partageant par exemple un discours de Vladimir Poutine, ou s’exprimant sur le meurtre de Lola. Il a aussi émis de nombreuses critiques vis-à-vis de la campagne de vaccination contre le Covid-19 et de la gestion de la pandémie par le gouvernement. «3 questions urgentes sur l’abus de pouvoir. 1. Légalité de l’obligation d’utiliser un médicament en phase expérimentale ? 2. Nécessité d’une enquête sérieuse sur les effets secondaires du «vaccin». 3. Nécessité de consulter le peuple français sur l’affaire ukrainienne !» a-t-il par exemple écrit le 12 mai.

En juin, toujours sur Twitter, le père Michel Viot s’est fait remarquer en sous-entendant très fortement que les vaccins pourraient entraîner des décès. «Je m’entretiens régulièrement avec les familles avant chaque service funèbre. Je pense qu’une commission parlementaire devrait rapidement se constituer concernant la politique de santé et surtout vaccinale !» a-t-il affirmé.

L’ecclésiastique a été invité, à la suite de cette sortie, sur le site conspirationniste «le Courrier des stratèges», puis par l’antenne d’extrême droite, Radio Courtoisie. Même s’il se défend d’être «antivax», le prête explique ne pas s’être fait vacciner contre le Covid sur son conseil de son cancérologue pour ne pas refaire «flamber» son cancer. Selon lui le vaccin affaiblirait les défenses immunitaires. Il raconte aussi avoir été «soigné» à l’Ivermectine, lorsqu’il a finalement eu le Covid. Il évoque enfin – tout en reconnaissant n’avoir reçu aucune plainte à ce sujet – le cas de certaines personnes décédées dont il accompagne les funérailles qui auraient reçu une dose d’un vaccin contre le Covid-19 peu de temps avant de mourir.

Critique du rapport Sauvé sur la pédocriminalité

Le père Michel Viot, rattaché au diocèse de Blois, est effectivement actuellement détaché comme aumônier adjoint à la pastorale des funérailles du diocèse de Paris. Il se charge ainsi de l’accueil et de l’accompagnement des familles en deuil. Il est ainsi amené à célébrer des messes et des enterrements, même s’il n’est pas rattaché à une paroisse, comme le confirme le diocèse de Paris à CheckNews. Ce qui ne suffit pas à conférer du crédit à son témoignage confus sur la dangerosité des vaccins contre le Covid.

Dans une vidéo diffusée cet été, il persiste et signe en versant dans un discours antivax des plus classiques en s’en prenant à «ceux qui n’hésitent pas à utiliser toute une population comme des souris ou des cochons d’Inde pour tester des produits pharmaceutiques en cours d’essai» avant de déplorer l’absence de «presse libre» pour évoquer ces sujets.

Le père Viot n’en est pas à ses premières prises de position polémiques. «C’est un homme de la provocation. C’est l’un des représentants de l’ultra droite catholique aujourd’hui. Ce n’est pas un porte-parole de l’Eglise catholique», observe Bernadette Sauvaget, qui suit les questions de religion et laïcité à Libération. Issu du protestantisme – ancien inspecteur ecclésiastique, l’équivalent d’évêque – et ancien franc-maçon, Michel Viot avait annoncé avec fracas sa conversion au catholicisme au début des années 2000.

Depuis il a multiplié depuis les prises de position dans les médias, sur son blog et ses réseaux sociaux ainsi que dans une dizaine d’ouvrages. En 2008, il a aussi fondé l’association Ecouter avec l’Eglise (visiblement inactive depuis 2014) avec monseigneur Dominique Le Tourneau, prêtre de l’Opus Dei, dont l’objectif était «de faire connaître et diffuser la pensée et les enseignements du magistère de l’Eglise catholique».

En plus de partager des positions conservatrices, comme l’opposition à l’avortement et l’euthanasie, Michel Viot a ouvertement critiqué, le rapport Sauvé sur la pédocriminalité dans l’Eglise. En mai 2022, il a publié un livre intitulé : le Rapport Sauvé : une manipulation ? «Méthodologie douteuse, habile usage de l’outil médiatique, chiffres fantaisistes, arrière-fonds idéologiques très orientés, grands flottements théologiques et juridiques, anachronismes notoires, mise au pilori des voix qui émettaient des réserves sur son contenu : la commission fut, de fait, indépendante, elle ne fut certainement pas neutre», peut-on lire en présentation.

Propos problématiques

Début novembre, il a apporté son soutien au cardinal Jean-Pierre Ricard qui a avoué avoir eu, une conduite «répréhensible avec une jeune fille de 14 ans», il y a trente-cinq ans. «Mon comportement a nécessairement causé chez cette personne des conséquences graves et durables», avait-il reconnu. Aveux suivis de l’ouverture d’une enquête pour «agression sexuelle aggravée» par le parquet de Marseille, le 8 novembre.

«Dans l’église du Christ où l’on doit croire au pardon, une faute commise il y a trente-cinq ans et réglée par les deux protagonistes, sans qu’aucune plainte n’ait été portée, et qu’aucune infraction aux lois n’ait pu être reprochée par la suite ne devrait plus être évoquée sauf impiété !» a réagi Michel Viot, sur Twitter.

En avril 2022, ses prises de position lui ont coûté sa participation à une émission sur Radio Notre-Dame où des prêtres répondent à des questions d’auditeurs. «Je tiens à rassurer les nombreuses personnes qui ont téléphoné dimanche soir à Radio Notre-Dame pour l’émission Un prêtre vous répond, et dont quelques-unes m’ont appelé ce matin. […] Le responsable de l’émission m’avait demandé de n’y plus m’y faire entendre, suite à des lettres qu’il aurait reçues, scandalisées par mes propos sur les chiffres de la Ciase (comme 8 membres de l’Académie catholique) et sur la guerre en Ukraine (reprenant ce qu’avaient dit le Saint-Père et le cardinal Parolin)», écrit-il sur son blog.

Contacté, Bruno Courtois, le directeur général de Radio Notre-Dame confirme l’éviction du prêtre sans entrer dans le détail des propos problématiques. «Il faut que l’émission soit suffisamment libre, les questions ne sont pas triées. Cette émission demande un peu de sens de responsabilité. Quand on est entrés en période électorale à la fin de l’hiver dernier, il a manqué de prudence. Il n’avait pas à prendre à position. J’ai estimé qu’il était plus prudent de lui dire au revoir», explique-t-il. Contacté, Michel Viot n’a pas répondu. A noter que, de son côté, la Conférence des évêques de France n’a pas de statut d’autorité mais plutôt de représentation de l’Eglise en France. Ainsi elle ne peut pas interdire à un évêque, prêtre ou fidèle de s’exprimer.


CONTENU SPONSORISÉ

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Previous post COP27 : on vous explique l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, qui pourrait être menacé à Charm el-Cheikh
Next post Injures contre Louis Boyard : le régulateur des médias ouvre la voie à une sanction de Cyril Hanouna