
Ngaparou: Une zone de pêche protégée en réponse à la raréfaction du poisson
Le monde de la pêche traverse une crise dûe à la rareté des ressources halieutiques. Une crise qui se manifeste parfois par des scènes de violences inouïes. Les images des affrontements entre les pêcheurs de Kayar et de Mboro sont récentes dans les mémoires. Pour protéger la ressource, à Ngaparou, les acteurs de tous bords se sont mobilisés autour du récif.
C’est un ciel de plomb qui écrase les quelques vagues de l’océan Atlantique qui se déferlent sur les côtes de Ngaparou. Cette localité est habitée principalement par des sérères et des lébous. Ces derniers ont pour principal activité la pêche. Un secteur qui fait vivre au moins 600.000 personnes au Sénégal. Ces pêcheurs évoluent dans leur majorité dans la pêche traditionnelle qui se fait à pied ou à bord d’embarcations non motorisées en utilisant des moyens techniques rudimentaires. Cette pêche traditionnelle est donc la première à sentir les difficultés de la rareté du poisson. Ce manque est par contre moyennement ressenti par les pêcheurs de Ngaparou. Ces derniers regroupés autour du Conseil Local de Pêche Artisanale (CLPA) travaillent en étroite collaboration avec la maison de pêche de Ngaparou, avec les mareyeurs, les charpentiers et femmes transformatrices afin de protéger les récifs dans la zone. Cette cogestion a abouti à la mise en place d’une zone de pêche protégée (ZPP).
« C’est la population elle-même qui a remarqué que les poissons utilisaient la zone comme refuge pour la reproduction. C’est ainsi qu’elle s’est mobilisée pour obtenir un arrêté faisant de cette partie une ZPP » témoignent Thipy Ndao, chef de Service du quai de pêche de Ngaparou. La pêche y est autorisée, mais l’activité est encadrée par des normes spécifiques à la zone. Dans cette zone, qui s’étend jusqu’à une dizaine de kilomètres à partir des côtes, il est interdit la chasse sous-marine, l’utilisation des engins à grande capacité de prélèvement (palangre, senne tournante, senne de plage, trémail, filet dormant de maille de côté inférieure à 60 mm), l’introduction de passage des jets ski et la limitation du nombre de filets par pirogue à 20 unités. Thipy Ndao explique que « la zone protégée c’est pour ceux qui pratiquent la pêche à la ligne ». En outre, la pêche de nuit est également interdite.
L’application de ces mesures a participé à l’augmentation du poids moyen des langoustes débarquées: de 295 g (2005) à 430 g (2010), à l’augmentation des rendements pondéraux de langouste : 1,5kg/sortie (2006) à 3,5kg/sortie (2010), soit 133%. Il a été également noté la prolifération des espèces démersales et juvéniles. « Au mois d’août, le quai peut enregistrer jusqu’à cinq tonnes de produits par jour », rajoute Mourtada Ndiaye secrétaire général du du GIE interprofessionnel.
Un temps de repos biologique est également observé afin de favoriser la reproduction. Ces politiques ont rendu la zone poissonneuse au point d’attirer nombre de convoitise. « Nous notons très souvent des incursions de pêcheurs étrangers ne respectant pas les règles dans la zone. Les agents qui se chargent n’ont cependant pas de statut juridique leur permettant d’agir. Ils se contentent de signaler face à des situations où les fauteurs sont en supériorité”.
A ce propos, Thipy Ndao milite pour la « restauration de signalétiques montrant les limites de la ZPP ».
Aujourd’hui la zone protégée est devenue un patrimoine pour les acteurs de la pêche artisanale à Ngaparou. Ceci combiné avec l’agrément du quai de pêche permet l’exportation en grande quantité des produits halieutiques.