«J’ai pensé au suicide» (1/5) : le poignant récit d’un condamné à la prison à vie

Dans le cadre d’un dossier sur les longues détentions préventives, L’Observateur a donné la parole à des victimes de cette faille du système judiciaire. Épisode 1 : le témoignage de Moussa Diao, emprisonné pendant cinq ans pour un cambriolage et un meurtre qu’il n’a pas commis.

«Je n’ai jamais agressé, ni volé de ma vie. Un beau jour, alors que j’étais assis au milieu de mes deux épouses et mes douze enfants, des gendarmes, lourdement armés et encagoulés, ont débarqué chez moi au village de Koumaré dans la commune de Méréto, département de Koumpentoum, pour m’arrêter, disant que j’avais pris part au cambriolage au cambriolage du bureau de poste-finances de Koumpentoum et au meurtre du commandant Tamsir Sané. Ils m’ont embarqué pour la brigade de Koumpentoum, malgré mes dénégations.

«Après la brigade, mes co-accusés et moi avons été envoyés au tribunal de Tambacounda. On m’a présenté au juge, qui m’a inculpé puis placé sous mandat de dépôt à la prison de Tambacounda. Ensuite, on m’a transféré à Rebeuss où j’ai passé deux mois et quelques jours avant de revenir à Tambacounda pour les besoins du jugement devant la chambre criminelle. Mes co-accusés et moi avons été condamnés à la prison à vie.

«Par la suite, nous avons été transférés à Koutal où nous avons passé deux ans. Là-bas, j’ai pensé au suicide car j’ai beaucoup souffert. Je n’arrivais pas à comprendre qu’on puisse me garder en prison pour une affaire que je n’avais pas commise. Mes deux femmes et mes douze enfants me posaient plus de soucis. Ils savent que je ne suis pas coupable. Mais certains habitants de notre village m’avaient abandonné, me considérant comme un bandit. Or, c’est par erreur que j’ai atterri en prison.

«Quand on m’a acquitté, le 21 novembre 2022 par la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Tambacounda, je ne comprenais pas. J’ai demandé à l’interprète et il m’a expliqué que j’étais libre de toute poursuite. Je n’étais pas satisfait, mais j’ai remercié le Bon Dieu. Jusqu’à présent j’enrage. On m’a bousillé la vie. On m’a arraché à mon travail, mis en prison pendant près cinq ans pour ensuite m’acquitté.

«De retour à la maison à Koumaré, j’ai failli danser. Maintenant j’ai compris que les choses ont changé. Même si vous ne faites rien, vous pouvez vous retrouver en prison. J’aimerais bien que la prison sorte de ma tête, mais je n’y arrive pas.»

 
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