En France, il est difficile d’évoquer avec « nuance » les inégalités raciales, regrette Pap Ndiaye
Face à un panel d’étudiants majoritairement afro-américains, le ministre, en visite aux Etats-Unis en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, a repris ses habits d’universitaire, décrivant les différences entre la France et les Etats-Unis en matière de lutte contre le racisme.
« L’Etat français est officiellement indifférent à la couleur de peau », a rappelé cet historien, spécialiste des minorités américaines, qui est lui-même de père sénégalais et de mère française.
« C’est une belle idée, bien sûr (…) mais la réalité impose une approche plus concrète », a-t-il poursuivi en relevant, dans un anglais courant, que « les inégalités, les discriminations et différentes formes de racisme existent en France ».
Pour s’y attaquer « efficacement » dans le monde de l’éducation, il faut « identifier les quartiers les plus pauvres et investir davantage dans leurs écoles », a-t-il estimé.
Cette réponse « met clairement l’accent sur les inégalités sociales » parce que « le concept de race reste très sensible en France », a-t-il relevé, face à des étudiants habitués à l’inverse aux politiques ciblées sur la base de statistiques ethniques.
Une pratique impensable en France, où « les organisations d’extrême droite sont puissantes actuellement » et où il est, selon lui, « difficile d’affronter de manière nuancée les questions ethno-raciales ».
« Je peux attester du prix à payer quand on ose en parler », a poursuivi le ministre, qui a été accusé par le Rassemblement national d’être « un militant racialiste ».
Mais, a-t-il assuré, « cela ne nous empêchera pas de travailler activement pour développer une culture plus inclusive dans nos écoles, pour que personne ne s’y sente exclu à cause de son genre ou de sa couleur de peau ».
La veille, à New York, il s’était rendu au très huppé lycée privé français de Manhattan et dans une école bilingue français-anglais d’Harlem, où vivent des minorités afro-américaines et d’Afrique de l’Ouest.
Lui qui a étudié dans une université en Virginie avait confié être « parfois considéré comme trop américain en France, un peu trop +woke+ », et avait dénoncé « les traces d’anti-américanisme souvent bien évidentes » dans le discours politique français.
Son prédécesseur Jean-Michel Blanquer était d’ailleurs un détracteur du « wokisme », un terme utilisé à droite pour dénoncer une prétendue complaisance de la gauche envers les revendications des minorités.