Chine : l’incroyable méthode de Xi Jinping pour choisir ses hommes de confiance
De notre correspondant à Pékin,
Cette sélection des hommes du président a commencé dès la fin 2020, selon Xinhua. En tant que secrétaire général du parti, Xi Jinping a personnellement présidé en mars 2021 la réunion du « comité permanent du bureau politique du comité central pour une recherche spéciale », qui a mis en place le groupe chargé de l’inspection des cadres.
Il a aussi donné des instructions sur le processus et les critères de sélection – avec évidemment dans ces critères celui de la loyauté au chef de l’État et au principe des « deux établissements ». La théorie instaurée par la résolution historique du parti en 2021 vise à « établir le statut du camarade Xi Jinping en tant que noyau du comité central du parti et de tout le parti » et à « établir le rôle directeur de la pensée de Xi Jinping sur le socialisme à la chinoise pour la nouvelle ère. »
Respect du chef de l’État en tant que « noyau » du parti et suivi de ses idées. Les candidats, selon Xinhua cité par le South China Morning Post, devaient également être en mesure de « lutter » contre les sanctions de l’Occident et préserver la sécurité nationale. Enfin, il y a eu un contrôle de l’intégrité des candidats. « Faites attention au comportement des conjoints, des enfants et de leurs conjoints, des cadres dirigeants dans les affaires », disent les directives rapportées par l’agence Chine Nouvelle. La corruption venant souvent par les proches.
Ce long processus a conduit à renouveler la moitié du bureau politique. Les quatre nouveaux entrants parmi les sept membres du comité permanent au sommet du pouvoir chinois sont des fidèles du président. Certains ont travaillé avec lui directement quand Xi Jinping était secrétaire général de la riche province orientale du Zhejiang (ouest).
« Xi Jinping était le secrétaire du parti dans la province du Zhejiang et, à ce poste, il était très impliqué dans les affaires du parti, les affaires gouvernementales, mais aussi les affaires militaires, souligne Gao Zhikai, directeur adjoint du think tank chinois Centre pour la Chine et la mondialisation (CGC). En tant que commissaire politique, il a doublé les effectifs de la garnison de l’armée du peuple dans le Zhejiang, poursuit le politologue. En fait, il a géré la province dans tous ses aspects, ce qui lui a permis d’établir de nombreuses connexions. Il a rencontré des chefs de province, des responsables de préfecture, des maires, etc. Et il a zoomé sur des personnes qualifiées qu’il avait rencontrées, avec qui il a travaillé. Cela n’est donc pas surprenant du tout. »
Une équipe de fidèles du président, que certains ont surnommé la « nouvelle armée du Zhejiang ». Avec en figure principale Li Qiang, le secrétaire du Parti communiste chinois (PCC) de Shanghai qui a une expérience dans deux provinces de poids (Zhejiang et Jiangsu) ainsi qu’à la tête de la capitale économique chinoise qu’il a confiné pendant près de trois mois au printemps 2022. Mais il manque d’épaisseur politique et, en tout cas, il n’a pas d’expérience de vice-Premier ministre au sein du gouvernement central. Un futur Premier ministre loyal donc, qui dans cinq mois devrait s’effacer derrière le chef de l’État.
Au lendemain de la désignation de la nouvelle équipe dirigeante en Chine, entretien avec Gao Zhikai. L’ancien traducteur de Deng Xiaoping est aujourd’hui le directeur du Centre pour la Chine et la Mondialisation, un think tank fondé par une organisation relevant du département du Front uni du Parti communiste chinois. Quels enseignements tirer de ce comité permanent ? Qu’en pense-t-on dans les cercles proches du pouvoir ? Éléments de réponse.
RFI : Lorsqu’on regarde la composition du nouveau comité permanent, on ne voit que des hommes du président. Est-ce un risque pour l’équilibre du parti ?
GZ : Moi je constate que le nouveau comité permanent issu de la première session plénière du 20ème Congrès a renouvelé trois membres de l’ancien comité et en élu quatre nouveaux. Et chacun d’eux, sans exception, a une expérience très riche de la gouvernance, une expérience probablement que beaucoup de nouveaux responsables politiques en Occident n’ont pas.
Vous parlez de Li Qiang, qui a une expérience régionale certes, mais n’a pas d’expérience au sein du gouvernement central. Est-ce que cette absence de poids politique n’est pas antinomique avec la fonction ?
Je ne pense pas. En Chine, nous avons un dicton qui dit que diriger un grand pays, c’est comme cuisiner un petit mets délicat. Qu’est-ce que cela veut dire ? Tout simplement, que si vous pouvez faire du bon travail dans une province, en particulier dans les deux provinces et ville province, Zhejiang, Jiangsu et Shanghai, vous avez déjà exercé un rôle très riche dans tous les aspects du parti, du gouvernement et de l’armée.
Li Qiang, en tant que secrétaire général du Parti communiste de Shanghai, a confiné sa ville et ses habitants pendant près de trois mois au printemps dernier. Est-ce que cela veut dire que sous Xi Jinping, la loyauté est plus importante que la popularité ?
Je vais vous répondre ceci. Lorsque Li Qiang était secrétaire du parti pour le Jiangsu, j’ai rendu visite à ma ville natale. J’ai visité Nankin et j’ai rencontré Li Qiang personnellement, il a prononcé des discours lors de ces importants forums internationaux. La province du Jiangsu est l’une des provinces les plus importantes sur le plan économique. C’est la deuxième plus grande économie, à côté du Guangdong. Un territoire très innovant et très entreprenant avec, à la fois des entreprises publiques, ainsi que des entreprises privées et également très impliquées dans le commerce extérieur. Les entreprises étrangères investissent notamment dans les villes de Jiangsu. Donc, Li Qiang a su créer des liens avec les milieux d’affaires et les entreprises internationales.
Vous voulez dire que malgré le confinement de Shanghai, Li Qiang serait un signe d’ouverture envoyé aux investisseurs ?
Quand pensez-vous que la Chine va s’ouvrir ? Est-ce que la Chine va renoncer à la politique sanitaire Zéro Covid ?